Juste un peu avant d’arriver, nous croisons une route qui va à la mer de Beaufort : l’Arctique quoi! Nous sommes à 800km environ d’un village inuit sur le bord de l’Arctique. Ça fait rêver. Et puis ici, c’est le jour toute la nuit….Eh oui, le soleil ne se couche pas l’été au 64 ième parallèle et on voit bien par le paysage que le pays change. On est demeuré pratiquement tout le temps dans la vallée du Yukon depuis Whitehorse et force est de constater que cette vallée est glacière avec son relief coincé entre des montagnes pas très hautes. Un peu avant d’entrer dans la ville, sur plusieurs kilomètres, on voit des amas de roches dont la grosseur varie. Ils ont l’air empilé là et on se demandait bien ce que c’était. Finalement, nous n’arrivons pas à expliquer cela autrement que par l’accumulation des résidus de dragage, ce qui sera confirmé par la suite. « Fascinant » dirait notre ami Tisseyre.
Dawson est difficile à définir. Un peu comme dans Star Trek, c’est l’ultime frontière. On a l’impression de se promener entre la ville musée et le village abandonné. Les reconstructions et restaurations faites à date cohabitent avec des espaces encore non aménagés où traînent des maisons et bâtiments parfois croches, parfois affaissées. Les rues sont en terre et les trottoirs en bois. Ici certains trottoirs ont l’air de vagues. Mon père me parlait des trottoirs de bois lorsqu’il était petit dans les années 30 à Québec. Il disait qu’il trébuchait souvent sur ces trottoirs parce que les planches ne sont jamais parfaitement égales. Oui c’est ça…on parle des années 30 pour les trottoirs de bois.. On a pris soin de garder son look d’origine d’influence assez western dirions-nous et c’est ce qui fait sa marque de commerce. Un retour dans le passé des chercheurs d’or. Ici on est au cœur du Klondike, la rivière Klondike que nous avons cotoyé avant d’arriver se jette dans le fleuve Yukon qui lèche les bordures de la ville.
Des milliers de personnes y sont venus pour faire fortune. Les traces qu’il en reste ce sont ces vestiges de commerces, de maisons et d’installations d’un autre temps où la ville s’animait et vivait de la rencontre de ces gens venus de partout. Plusieurs des aventuriers venaient des US. À tel point qu’au début du siècle on fêtait la confédération et le jour de l’indépendance américaine ensemble. Tout cela est rendu vivant par les habitants qui y vivent maintenant pour les touristes assoiffés des histoires et des mythes de cette période. L’achat de l’Alaska par les américains en 1867 avait rendu le Canada nerveux. Ils craignaient les revendications territoriales. C’est ce qui explique que rapidement des équipes de la police montée s’installèrent et que le commissaire du Yukon nommé par Ottawa fit de même. Cela donnait une légitimité à la propriété territoriale.
Le musée de Dawson nous aide à mettre des images sur cette histoire de ruée vers l’or. Les efforts, les énergies déployés, la technologie utilisée, les succès à bout de bras et de sueurs côtoient les malheureuses victimes, la pauvreté de la majorité et le mauvais sort fait aux premières nations encore une fois. Les années 1900 je pense que c’était pas facile à nulle part dans le monde mais ici, la misère se nourrissait d’espoir et de rêves déchus.
La ville c’est tout petit et la visite se fait à pied tranquillement. Nous avons pris une visite guidée avec un guide de Parcs Canada. On y a appris beaucoup. Parc Canada a fait une liste des bâtiments par priorité et reconstitue graduellement leur architecture. Des groupes communautaires ainsi que le conseil de ville s’assurent quant à eux que toute nouvelle construction soit dans un style compatible. C’est vraiment réussi. On a l’impression de tourner les pages d’un livre d’histoire. Les bars et saloon sont tout de même assez nombreux. D’ailleurs on est allé prendre un verre en soirée dans un saloon appelé « Sourtoe saloon » où pour être membre du club il faut boire un whisky avec un orteil déshydraté dedans….On vous donne un certificat si vous réussissez…. On est devenu membre!
Une de nos visites fut celle de la Drague no 4. La drague est à environ 30 minutes de la ville et tout le long de notre chemin on trouve des petits groupes ici et là qui opèrent des pelles mécaniques et passent le sol dans leur tamis. Mais la drague no 4 est un monstre…C’est une immense machine de 300 pieds de long, un bateau usine de 8 étages dont la fonction est de draguer le sol et en retirer l’or. Cette machine est installée près de la rivière Bonanza, dans un trou que l’on remplit d’eau pour qu’elle flotte`, et là s’empare du sol en avant, en retire l’or au centre du bateau puis éjecte les roches lavées en arrière. Elle dévore le sol à coup de 10 pieds et laisse des vagues de cailloux à l’arrière. Ces fameux tas que nous avons vu à notre arrivée. Elle pouvait produire environ une trentaine d’onces en quelques jours. C’est de la poussière d’or et des flocons qui émergeait de ce procédé. Phénoménal exemple du génie humain du début du XXième siècle. C’est de cette rivière que partit la rumeur d’or abondant et créa la ruée vers l’or.
Bien sûr que les aventuriers y sont venus avec les moyens de l’époque pour y faire fortune. Cela prenait des mois pour arriver et les risques étaient nombreux. De grandes entreprises s’installèrent et y firent fortune aussi. Encore aujourd’hui, les mines d’or sont exploitées et demeurent le fondement de l’économie locale. À Dawson il y a bien ces magnifiques paysages tout autour mais une des plus belles vues c’est assurément ce regard vers le passé et l’humain qui en a fait l’histoire. C’est à voir et les kilomètres à couvrir en valent la peine.
Pour notre dernier soir nous avons la chance d’avoir une magnifique percée de soleil, phénomène assez rare dans les 15 derniers jours plutôt dans la grisaille. Nous empruntons une route pas loin qui s’appelle Dome Road et qui nous nous amène sur une montagne, véritable promontoire qui domine la ville et donne une vue imprenable sur toute la région de Dawson et le fleuve Yukon. C’est à tomber par terre. Puis, de retour au camping, la belle température aidant, patiemment nous attendons le soleil de minuit au pays où le soleil ne se couche pas.
Dawson c’est 500 km plus loin que nulle part mais c’est un incontournable moment d’histoire et le témoin vivant d’une époque pas si lointaine.
À partir de maintenant nous amorçons un retour vers l’Est mais encore de belles choses nous attendent sur notre route. Il n’y aura pas souvent de réseau alors les éditions peuvent subir des retards….. à bientôt
2 réponses sur « Dawson City »
Encore superbe les photos et récits, merci pour le voyage numérique!! 😊
Voir Le Soleil de minuit à Dawson City c’est une belle façon de conclure la première étape du voyage.
Bonne continuation vers l’est. On continue de vous suivre.👋